Aux États-Unis, la vaccination des enfants contre le Covid-19 vient d’être décidée.
Les autorités d’évaluation scientifique ont estimé cette stratégie justifiée et acceptable au regard du désavantage possible d’une non-vaccination. Cette priorisation de la vaccination à l’ensemble des habitants du pays aurait pu néanmoins être confrontée aux données du rapport publié le 15 septembre 2021 par le PNUD, l’OMS et l’Université d’Oxford pointant que seuls 3,07% des populations de pays à revenu faible ou moyen avaient bénéficié d’une première dose de vaccin. Des points de vue santé publique, éthique et géopolitique, une telle hiérarchisation dans l’échelle des urgences sanitaires, qui ne s’imposait pas à l’égard de l’ensemble des enfants américains, me paraît révélatrice de considérations politiques discutables au regard du bien commun, et de nature à fragiliser la crédibilité des résolutions réaffirmées par le G20 le 31 octobre visant la vaccination de 40% des populations du monde d’ici la fin 2021.
Dans son avis du 9 juin 2021 “Enjeux éthiques relatifs à la vaccination contre la Covid-19 des enfants et des adolescents” le masque kolmi enfant, le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) considérait : “[qu’] à ce jour la vaccination des enfants de moins de 12 ans ne semble pas éthiquement et scientifiquement acceptable, en grande partie parce qu’il n’existe aucune étude évaluant la sécurité des vaccins contre le Covid-19 dans cette population.” Des données récentes tirées d’essais cliniques ont incité les autorités américaines de régulation à donner leur autorisation.
En France et en Europe, les agences sanitaires procèdent actuellement à leurs propres investigations, de telle sorte que le CCNE pourrait être amené à revoir la teneur de son avis selon leurs conclusions, dans un contexte national désormais favorable à la vaccination : à ce jour 74,6% des Français sont vaccinés. Pour autant, le bien-fondé de son extension aux enfants fait dès à présent l’objet de réserves, ne serait-ce que parce que la prévalence de l’obésité infantile aggravant l’exposition aux risques du Covid-19 est moindre qu’aux États-Unis.
Une réflexion éthique spécifique
Afin d’anticiper l’éventuelle opportunité de cette vaccination des enfants, il convient d’observer que sa recevabilité éthique suscite nombre de points de tensions qu’il serait pertinent de discuter sans tarder dans le cadre d’un débat public attentif aux spécificités de cette démarche de santé publique. Ils ne concernent pas que des considérations d’ordre biomédical et justifient de sensibiliser les parents à des enjeux qui engagent leurs responsabilités et les confrontent à des dilemmes.
Depuis 2020, j’ai estimé nécessaire d’accompagner les premières vaccinations en France par une réflexion documentée relative aux enjeux humains, éthiques et sociétaux parfois inédits auxquels nous étions confrontés
Entre la prévalence accordée aux enjeux supérieurs de santé publique au regard de choix personnels, l’évaluation des risques acceptables dans une stratégie vaccinale, les modalités de priorisation, la prise en compte des vulnérabilités socioculturelles du point de vue de l’équité, l’incitation à la vaccination plutôt que son obligation, la gouvernance et l’organisation des dispositifs, les modalités de communication et d’information, le discernement éthique aurait pu davantage intervenir pour éclairer les arbitrages et contribuer à leur acceptabilité sans devoir recourir à des stratagèmes controversés comme ce fut le cas dans la mise en place du passe sanitaire.
Tenons compte de cette expérience ambivalente pour aborder en responsabilité, dans la transparence et la concertation une autre phase de la stratégie vaccinale.
La vaccination d’un mineur, qui d’un point de vue légal est placé sous l’autorité parentale, impose des approches circonstanciées, respectueuses de son intégrité, de son intérêt personnel et de ses droits. Des textes juridiques, éthiques et déontologiques présentent un cadre de nature d’une part à lui assurer une protection nécessaire du fait de ses vulnérabilités, et d’autre part de le reconnaître dans sa faculté d’affirmer son libre choix en tenant compte de sa maturité, de son jugement critique et de sa volonté d’être associé aux choix qui le concernent.
De même qu’en décembre 2020 il a été opportun de prendre en compte les conditions de consentement d’une personne âgée vivant en établissement, en tenant compte des avantages personnels qu’elle pourrait tirer d’une vaccination et tout autant de ses devoirs de réciprocité et de solidarité envers les autres résidents .